Ce voyage est un peu sorti de nulle part. Je n’avais jamais quitté l’Europe plus de trois jours, j’envisageais sérieusement de partir en Afrique, et puis, mon oncle Jean Nerva, alors ambassadeur Shades Of Love et organisateur des deux premières expéditions au Zanskar est décédé des suites d’un lymphome oculaire. A partir de ce moment-là, tout est allé très vite. A Noël, ma tante m’a proposé de partir l’été suivant, pour Jean, et c’était lancé : sponsorings, collectes de lunettes, visa, et paf, « Welcome to India ».
J’ai passé les deux premiers mois au sein d’associations : tout d’abord la distribution de lunettes de soleil en Himalaya, avec Shades Of Love, puis, au fil des rencontres, un autre projet humanitaire avec l’association Hymalayan People. Une fois les missions terminées, j’ai décidé d’aller à Benarès, Calcultta, puis Delhi.
Tout était violent, tout était épuisant. J’ai enfin pu prendre le temps de faire le point sur ce que j’avais vu les deux mois précédents, d’essayer de le comprendre. J’ai également pris le temps d’être seul, de me perdre et de m’ennuyer. Je ne voyais pas comment faire des photos sans qu’il y ait une part d’ennui, dans mes journées.
J’ai vécu des moments de joie profonde, comme à Calcutta, où j’ai été frappé par chaque détail, chaque odeur, chaque regard, mais aussi des moments de cafard profond. L’absence de routine et le choc culturel m’ont fait perdre mes repères. Ce pays de tous les superlatifs m’a semblé aussi terrifiant qu’attirant.